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Kenya : en finir avec l’ingérence face à la société civile, garantir un processus électoral pacifique

Conférence de presse de la société civile kenyane suite aux tentatives de réinscription de la Commission des droits de l’Homme au Kenya et de l’AfriCOG, le 15 août 2017.. © Mentalacrobatics
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Afrique
Avec une élection présidentielle aux résultats contestés, le Kenya doit garantir un processus électoral pacifique en permettant à la société civile de travailler sans entrave.

« L’ingérence vis à vis des organisations de la société civile et des militants qui a suivi les élections présidentielles au Kenya en 2017 doit cesser immédiatement », a affirmé la Coalition pour la Cour pénale internationale le 18 août.

Le 16 août, des rapports ont révélé que l’autorité fiscale du Kenya (KRA) et l’autorité nationale des ONG, avaient diffusé une lettre sur les médias sociaux visant à désinscrire des organisations de la société civile, la Commission nationale des droits de l’Homme du Kenya (KHRC) et le Centre africain pour la gouvernance ouverte (AfriCOG). Ces deux groupes insistent sur le fait qu’ils sont en pleine conformité avec les dispositions juridiques et les règlements en vigueur. Le secrétaire du cabinet de l’Intérieur a par conséquent renversé l’ordre d’interdir le KHRC et mis en place une procédure visant à obtenir une résolution à l’amiable auprès des autorités de réglementation.

« L’intimidation de la société civile au Kenya doit immédiatement cesser » a déclaré Jelena Pia-Comella, directrice exécutive adjointe de la Coalition pour la Cour pénale internationale. « Le gouvernement kenyan est responsable de la sécurité de tous ses citoyens, en particulier en cette période d’instabilité post-électorale. Il est essentiel de garantir la non-violence ainsi qu’un contexte permettant à la société civile, aux associations et aux assemblées, de s’exprimer librement ».

Le KHRC et AfriCOG plaident en faveur d’un processus électoral équitable et transparent fondé sur la responsabilisation, l’intégrité et la bonne gestion, tant dans le cadre des élections présidentielles du 8 août, qu’après ces élections où le candidat-président Uhuru Kenyatta a été déclaré vainqueur avec 54% des voix.

« Ces quatre dernières années, le KHRC a fait l’objet d’un examen minutieux en raison de notre travail visant à remédier aux violations des droits de l’Homme au Kenya. Nous avons fait face à de fausses accusations de fraudes financières dont l’évasion fiscale, le soutien au terrorisme et l’emploi d’étrangers sans permis de travail », a précisé George Kegoro, directeur exécutif du KHRC. « Le harcèlement auquel nous sommes confrontés correspond à certains développements de la société kenyane : des affaires à la Cour pénale internationale ont impliqué des hauts responsables d’Etat, y compris la présidence, des opérations de lutte contre le terrorisme n’ont pas respecté les dispositions constitutionnelles, et les élections générales de 2017. Le moment de ces attaques, leur caractère public, et leur absence de statut juridique ou constitutionnel les font apparaître comme une campagne de diffamation et une atteinte au gouvernement kenyan destinées à perturber le travail réalisé par la Commission des droits de l’Homme au Kenya ».

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme (Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) en partenariat avec l’Observatoire) a dénoncé les raids en représailles à l'implication des deux organisations dans la surveillance des élections.

« Le KHRC a été en première ligne concernant le travail pour le respect des droits de l’Homme au Kenya. Cela ne fait aucun doute qu’il s’agit de représailles conséquemment à ce travail de surveillance des droits de l’Homme lors des élections. C’est un procédé honteux qui remet une

nouvelle fois en question le rôle du conseil de coordination des ONG et la nécessité de mettre en oeuvre de toute urgence la loi sur l’organisation des avantages publics (PBP) adoptée en 2013 », a déclaré Alice Mogwe, vice-présidente de la FIDH.

Le candidat de l’opposition, Raila Odinga, a refusé d’accepter le résultat de l’élection et annoncé qu’il allait lancer une contestation judiciaire. Le haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, le haut-représentant de l’Union européenne, Federica Mogherini, et l’ancien secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, font partie de ceux qui exhortent ceux qui contestent les résultats à le faire par des moyens constitutionnels et légaux.

Au moins 17 personnes ont été tuées et 177 blessées dans des affrontements depuis les élections du 8 août. Des cas de brutalités policières après les élections ont également été relatés, et des munitions à balles réelles utilisées contre les manifestants. Les tensions se sont intensifiées au Kenya dans les mois qui ont précédé les élections, avec des allégations selon lesquelles des défenseurs des droits de l’Homme, des militants pour la justice, des journalistes et des blogueurs avaient été ciblés. L’agent électoral, Chris Msando, a été retrouvé mort avant le scrutin, avec des signes apparents de torture.

Suite à la flambée des violences après les élections contestées de 2007, il a été demandé au procureur de la Cour pénale internationale d’ouvrir une enquête dans le cadre des allégations de crimes contre l’humanité. Toutes les affaires ont finalement été abandonnées suite à des revendications de subornation de témoins. Par ailleurs, la violence liée aux dernières élections n’est pas couverte par l’enquête en cours à la CPI.

La Coalition continue à souligner la nécessité d’une véritable responsabilisation nationale pour les morts et les violences liées au élections de 2007, ainsi qu’une meilleure protection pour les défenseurs des droits.

L’ingérence du gouvernement dans le travail des organisations de la société civile, y compris celles qui travaillent pour la responsabilité des graves atteintes aux droits de l’Homme par le biais de la CPI, est en augmentation dans le monde. Au début de l’année, les interventions à la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples, au nom des défenseurs des droits de l’Homme en Afrique, ont dénoncé entre autres violations, la radiation de représentants de la Coalition burundaise pour la CPI après que ceux-ci ont parlé ouvertement de leur Etat devant le Comité contre la torture des Nations-Unies. Des ONG en Turquie ont également récemment été soumises à la détention arbitraire et au harcèlement judiciaire.

En savoir plus sur l'enquête de la CPI au Kenya